Il dit qu'à présent Renart sera souvent guetté avant que la guerre commence, et qu'il sera fou s'il ne prend pas garde. Il font de grands efforts pour le surveiller, mais il ne se passe pas une semaine avant qu'il leur arrive une aventure étrange. Alors que le chemin tourne près d'un essart à coté d'un enclos, Renart a failli être acculé. On avait déjà coupé les pois, la paille était attachée, rassemblée et alignée sur le chemin. Renart connaissait bien cet endroit, il y était venu pour fouiner, chercher, guetter si il y avait quelque nourriture. Ysengrin qui ne demande rien d'autre que de pouvoir le tenir, baisse la tête car il le reconnait : il pousse un cri puis l'appelle. Renart qui n'est point rassuré, l'a bien entendu et compris, alors il s'enfuit l'échine tendu. Hersent et Ysengrin se mettent aussitôt en route ensemble. Ils font tous leurs efforts à le poursuivre mais il ne peuvent prendre le dessus. Renart court sur un sentier étroit, et Ysengrin court tout droit. Hersent s'efforce de piquer de l'éperon pour essayer de rejoindre Renart. Ysengrin réalise qu'il s'est trompé car Renart a bondi dans une autre direction; Ysengrin corrige sa course. Cela met Renart en colère, car il ne veut pas se livrer à lui; au contraire il n'arrête pas d'éperonner jusqu'à l'entrée d'un trou profond. Arrivé là, il y pénètre aussitôt. Il aperçoit alors son amie Dame Hersent qui est très fâchée contre lui, mais il voit qu'il n'a plus à la redouter. Pourtant Hersent agit plus que bêtement. Elle entre à la suite de Renart dans le trou avec plein d'élan jusqu'au ventre. Le château de Renart est très solide, et Hersent s'est jetée tellement fort dans la tanière qu'elle ne peut plus se dégager en arrière. Quand Renart voit qu'elle est prise, il ne veut laisser en aucune manière l'occasion de lui faire l'amour et de prendre d'elle tout son plaisir. Peu s'en faut qu'elle n'en crève, à cause du trou et de Renart qui l'écrase. Le trou la comprime de partout avec Renart la poussant par derrière. Elle n'a là rien qui puisse l'aider mais seulement sa queue qu'elle serre fort du coté de ses reins, pour que les deux trous de son derrière ne se voient pas de l'extérieur. Mais Renart saisit la queue avec ses dents et la rabat sur la croupe, pour lui dégager les deux trous. Puis il lui saute dessus tout joyeux, et il la prend aux yeux de tous, que ça lui fasse du bien ou lui déplaise, tout à son aise et pour son grand plaisir. Elle lui dit pendant qu'il la prenait : « Renart, c'est un viol, eh ! bien, soit ! » Renart, pour qui il est agréable de lui livrer ainsi bataille, se tait, il la récompense si bien et lui en donne tant que toute la fosse en résonne. Quand la chose est finie Renart lui dit avec perfidie : « Dame Hersent, vous disiez que vous n'auriez jamais d'estime pour moi et que je ne vous ferais jamais l'amour pour la seule raison que je me vantais. Vraiment, je ne m'en excuserai jamais, si je l'ai fait, je le ferai encore; je l'ai fait et le ferai, je le dis et le redis. » Plus de sept fois, voir dix, ils ont recommencé leur affaire avant de se séparer.
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576 | Et dist, qu'or iert Renart gaitiez Sovent ainz que la guerre parte, Que foux sera s'il ne s'i garde. De lui gaitier sont en grant paine, Mes ainz que passast la semaine Lor avint aventure estrange. Ensi conme la voie change, Lez un essart delez un clous La dut estre Renart enclos. L'en avoit ja les pois soiez, Et li pesaz estoit loiez Et amassez et trait en voie. La savoit bien Renart la voie, Venus i estoit por furgier Et por enquerre et por surgier Dont il poïst avoir viande. Ysengrin qui el ne demande Mes que il tenir le peüst, Baisse la teste, sel conust; Gita un brait, si s'escria. Renart qui point ne s'afia, L'a bien oï et entendu, Si s'enfuist a col estendu. Apres se metent el chemin Entre Hersent et Ysengrin. Il se painent de lui chacier, Mes ne se puent avancier. Renart corut la voie estroite, Et Ysengrin corut la droite : Et Hersent s'esforça de poindre Qui a Renart se vodra goindre, Vit Ysengrin si a failli, Que Renart d'autre part sailli, Ysengrin se rest adreciez. De ce fu Renart correciez, Ne s'ose a lui abandonner, Ainz ne fina d'esperoner Jusqu'a l'entree d'un val crues. Qant il i vint, s'i entra lues. Qant vit Dame Hersent s'amie Qui vers lui iert si engramie, Il vit qu'il n'avoit de lui garde, Mes Hersent fist moult que musarde. Apres Renart en la fosse entre De plain eslais de ci au ventre, Le chastel Renart ert moult forz, Et Hersent par si grant effort Se feri dedenz la taisniere Qu'el ne se pot retraire arriere. Qant Renart vit qu'ele estoit prise, Ne volt laissier en nule guise Que il n'alast a lui gesir, Et faire de lui son plaisir. Par un petit qu'ele ne crieve, Que la fosse et Renart li grieve. Que la fosse desus l'estraint, Et Renart par devers l'enpaint. El n'a ileuc qui la resqeue, Mes que seulement de sa qeue Qu'ele estreint si devers ses reins, Que des deus pertuis de ses reins Ne pert nul defors ne dedenz. Mes Renart prist la qeue as denz Et li reverse sor la crope, Et les deus pertuis li destoupe, Puis si saut sus liez et joianz, Si li fait tot ses iauz veanz, Ou bien li poist, ou mal li plaise, Tout a laisir et a grant aise. Ele dist que qu'il li faisoit, Renart, c'est force, et force soit. Renart se test a cui est bel De ce qu'il li fet le cenbel, Si bien la paie et tel li done Que toute la fosse en resone. Ainz que la chose fust fenie, Li dist Renart par felonie, Dame Hersent, vos disiez Que ja ne me priserïez Et que james nel vos feroie Por seul itant que m'en ventoie. Ja voir ne m'en escondirai, Se jel fis, encor le ferai; Fis et ferai, dis et redis Plus de sept foiz, voire de dis, Ont l'afere recommencie Ainz qu'il eüssent partancie. |
Traductions à confirmer:
ReplyDelete1. (v. 503) "trait" = "aligné" ?
2. (v. 514) "col" = "échine" ?
3. (v. 518) "avancier" = "prendre l'avantage" ?
4. (v. 525) "rest" = "course" ?
5. (v. 529) "val crues" = "trou profond" ?
6. (v. 546) "grieve" = "écrase" ?
7. (v. 558) "li fait tot ses iauz veanz" = "il la prend aux yeux de tous" ?