en colère envers leur mère. Puis il se met aussitôt en route la tête baissée pour que personne ne le voie, il s'en va ainsi poursuivre ses occupations. Voilà alors seigneur Ysengrin qui rentre auprès des siens dans une tanière sous la roche. Il a tant couru, tant suivi de traces, tant cherché et tant pourchassé, qu'il est tout chargé de victuailles; peu lui importe les problèmes d'autrui. Il trouve alors sa maisonnée que Renart a mis sens dessus dessous. Et ses fils se plaignent à lui qu'ils ont été battus et déshonorés, qu'ils se sont fait pisser dessus et trainer, qu'ils ont été maltraités, puis traités de fils de putain, de bâtard, d'adultérin, et qu'il a dit en plus que vous êtes certainement cocu. Alors Ysengrin devient fou de rage quand il entend les reproches faits sur sa femme. Peu s'en faut qu'il ne tombe d'évanouissement, il hurle et crie comme un fou : « Hersent, je suis bien maltraité à présent. Sale, vile et méchante putain, je vous ai entretenue dans le plus grand confort, je vous ai bien protégée et bien nourrie, et un autre vous a baisée. Votre cœur est vraiment volage pour laisser Renart, ce rouquin, ce puant, cet infâme débauché, ce vaurien, vous monter entre les cuisses. Par les yeux de Dieu je suis cocu là à tort, vous m'avez complètement déshonoré. Vous ne coucherez plus jamais à coté de moi puisque vous avez reçu un tel hôte, à moins que vous fassiez toutes mes volontés. » Hersent aurait vraiment à se plaindre si elle ne lui promettait pas toute sa bonne volonté : « Sire, fait-elle, on dirait que vous êtes fâché, mais il n'est pas juste que vous manifestiez ici votre colère. Car si vous me laissez me justifier par serment ou par le jugement de Dieu, je le ferai de cette manière : que l'on me fasse brûler ou pendre si je ne puis me disculper. Je vous assure de plus que je ferai tout mon possible pour ce que vous voudrez me dicter. Celui-ci ne sait plus quoi demander; ce qu'elle dit est suffisant, sa colère est terminée. Mais il lui fait jurer qu'elle ne laissera plus jamais Renart en paix si elle a l'occasion de le voir. Qu'il prenne garde à présent, ce sera plus sage.
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488 | Et vers la mere coroucier, Si s'est tantost mis a la voie Le col bessié que nus nel voie, Si va porchacier son afere. A tant estes vos qu'il repere Dant Ysengrin a sa mesnie Qui soz la roche est entesnie. Tant a coru et tant tracié, Et tant porquis et pourchacié, Que toz est chargiez de vitaille. D'autrui domage ne li chaille, Si a trovee sa mesniee Que Renart ot estoutoiee. Si fil se sont a lui clamé Que batuz sont et disfamé, Et compissiez et traïnez Et laidengiez et puis clamez Fil a putain, bastart, avoutre, Et encore dist il tot outre Certes que vos estiez cous. Lors s'est Ysengrin d'ire estous Qant de sa fame oï le blasme; A bien petit qu'il ne se pasme, Il ulle et bret come desvez. Hersent, or sui je malmenez; Pute orde vis, pute mauvese, Je vos ai norrie a grant aise Et bien gardee et bien peüe, Et un autre vos a foutue. Moult est tes corages muanz Qant Renart cil rous, cil puanz, Cil vil lechierres, cil garçons Vos monta entre les arçons. Par les iaus Dieu mar i fui cous, Honi m'avez tout a estrous; Ja mes ne gerroiz lez ma coste Qant receü avez tel oste, Se ne faites tot mon voloir. Ja se peüst Hersent doloir Se ne l'eüst acreanté Tot son bon et sa volenté. Sire, fait ele, vos diroiz Corociez estes, n'est pas droiz Que vos mostrez ici vostre ire, Que se m'en lessiez escondire Par serement ne par joïse, Jel feroie par tel devise C'om me feïst ardoir ou pendre Se ne m'en pooie desfendre. Si vos afi ensorquetot Que mon pooir en feré tot De ce que vodroiz deviser. Cil ne set plus que demander, Il ot que ele dist assez, Ses mautalenz est trespassez, Mes que il li ait fait jurer Que james ne lera ester Renart, s'ele le puet veoir. Or se gart, si fera savoir. |
Traductions à confirmer:
ReplyDelete1. (v. 436) "A tant estes vos" = "Voilà alors" ?
2. (v. 437) "a sa mesnie" = "auprès des siens" ?
3. (v. 444) "ot estoutoiee" = "a mis sens dessus dessous" ?
4. (v. 458) "norrie a grant aise" = "entretenue dans le plus grand confort" ?
5. (v. 465) "Par les iaus Dieu mar i fui cous" = "Par les yeux de Dieu je suis cocu là à tort" ?
6. (v. 472) "Tot son bon et sa volenté" = "toute sa bonne volonté" ?
7. (v. 480) "desfendre" = "disculper" ?
8. (v. 489) "s'ele le puet veoir" = "si elle a l'occasion de le voir" ?
9. (v. 490) "Or se gart, si fera savoir" = "Qu'il prenne garde à présent, ce sera plus sage" ?